ÉDITO 2015

LES CORRESPONDANCES 2015

 

Pour ne pas se laisser contaminer par la langue creuse ou falsifiée de la société de consommation, par la langue morte des « éléments de langage », par la langue stérilisée du politiquement correct, par le flux sans mémoire ni perspective de l’info en continu, quel meilleur antidote que la littérature ? Celle qui crée et invente, fait surgir les images et perceptions du réel ou du romanesque et qui, surtout, fait confiance à l’intelligence des lecteurs. Cette volonté de « décapage » des mots qui nous entourent et nous saturent est sans doute l’une des vertus essentielles d’un festival littéraire.

 

Explorer la bibliothèque de Jean Giono (désormais sauvegardée), réentendre ou découvrir la pensée lumineuse de Roland Barthes, son amour de la langue vivante, son plaisir du texte, sa jouissance d’écrire ; et puis se laisser happer par ce flot de livres qui surgissent chaque fin d’été. Une rentrée littéraire exceptionnellement riche cette année : stimulante, inventive, engagée, inattendue, parfois pleine de fantaisie et de drôlerie (ce qui n’est pas courant en littérature française). Une rentrée littéraire où l’on pourra vérifier une nouvelle fois cet apparent paradoxe : la fiction est parfois la meilleure voie pour approcher la vérité ou le réel, pour faire rejaillir la mémoire, l’histoire et les racines de notre contemporain, pour éclairer notre époque si confuse.

 

On garde en mémoire cette belle formule de Tchekhov mise en lumière par Maylis de Kerangal : « réparer les vivants ». Si l’on veut y croire, c’est aussi cela que peut faire la littérature.

 
 

Olivier Chaudenson,
directeur.